Cela fait déjà depuis le 19 mai que le dernier article est sorti… Le temps file à une vitesse qu’on ne maîtrise plus – un peu comme Ginette quand elle perd le signal en rase campagne.
Depuis, on a quitté le plateau d’Albion, et on s’est tranquillement remonté vers Nantes, cap sur l’un de nos rayons de soleil préférés : notre cadette. Mais entre les deux, il s’en est passé, des choses. Des paysages, des rencontres, des retrouvailles… et une nacelle qui aurait pu virer au drame.
On a d’abord traversé la Drôme provençale avec ses splendides paysages, ses collines qui sentent la lavande, ses petits villages qui ne savent même pas qu’ils sont photogéniques, et ses marchés où le fromager te tutoie au bout de trois olives. On y a roulé doucement, en appréciant sa douceur de vivre, puis on a filé vers Noirétable, dans le Parc naturel régional du Livradois-Forez, avec l’envie de retourner au sanctuaire Notre-Dame de l’Hermitage, dans les Monts des Bois Noirs, où nous avions déjà fait une halte quelques mois auparavant.







Imaginez : d’immenses forêts de pins aux hauteurs vertigineuses, des sous-bois tapissés de mousse épaisse et de colonies de champignons, d’énormes rochers aux formes énigmatiques posés çà et là – comme si un géant avait joué aux billes – et un silence étourdissant. Et tout en haut, perché à 1 100 m d’altitude, une immense bâtisse austère, un monastère. Voilà, le décor est planté.
Ce lieu aurait très bien pu servir de décor à un remake du célèbre film de Stanley Kubrick, Shining, s’il n’abritait pas une communauté de religieuses malgaches. La blondasse y a retrouvé les sœurs avec lesquelles elle avait déjà bien sympathisé lors de notre première visite – un lien naturel et doux, renforcé par le fait qu’elle a grandi à Madagascar et que son prénom, Tiana, vient de là-bas. Retrouver ces sœurs-là dans ce coin reculé de France, c’était comme retomber sur une vieille photo d’enfance oubliée dans une boîte en fer : inattendu, touchant, et un peu magique.











Après ce moment suspendu au milieu des bois noirs, retour sur la route, direction la Sologne et le Canal de Berry, ce vieux serpent tranquille, oublié des bateaux pressés, bordé de chemins bucoliques et d’écluses paresseuses, le très joli Château de Chemery, qui fut la propriété d’Alain Souchon dans les années 1970 et la pause chez Laurent, un viticulteur, chez qui on avait décidé de nous camper pour la nuit, et c’est là que les choses ont basculé dans le champ du burlesque…







Le gars, une sorte de cousin éloigné de MacGyver, nous a accueillis avec un grand sourire (et probablement deux verres de trop dans le nez) et une fierté non dissimulée pour sa grue artisanale. Une espèce de vieux tracteur-grue rafistolé, au bout duquel il avait fixé une nacelle de fortune faite avec une cagette en plastique.
Il a lancé un “Alors? Vous montez?!” plein de malice à la blondasse en lui faisant un clin d’œil et avant même que le cerveau de la blondasse ait eu le temps de dire “non merci”, elle se retrouvait perchée à plus de dix mètres de hauteur, en équilibre au sommet d’un cerisier géant, suspendue à un bras métallique aussi rouillé qu’une barque abandonnée à marée basse.
Ce qu’elle n’avait pas vu venir, c’est que le bonhomme était aussi rouge qu’un coucher de soleil breton après trois pastis, et qu’elle venait probablement de confier son intégrité physique à un type qui tenait à peine debout. Trop tard pour faire machine arrière, elle a cueilli les cerises à la sueur de son vertige, concentrée comme jamais et en croisant tout ce qu’elle pouvait croiser pour que cette expérience se termine bien…
Le BG, mort de rire, s’est contenté d’immortaliser l’instant en prenant des photos sous tous les angles, totalement inconscient du potentiel danger.
Ce n’est qu’au moment où le joyeux luron, l’excité du transpalette télescopique, a aplati en reculant – sans même en avoir conscience – la table de pique-nique en bois que le BG a réalisé qu’il avait eu beaucoup de flair en garant Marcel à l’écart!
Mais le jeu en valait la chandelle : des cerises juteuses, sucrées, presque insolentes de perfection.




Puis on a repris la route, gonflés de cerises et de souvenirs, pour rejoindre notre rayon de soleil nantais : notre fille.
Et Nantes, quelle ville ! Vivante, vibrante, bouillonnante d’énergie. Il s’y passe toujours quelque chose, même quand on essaie simplement de se poser pour un café. Expos de rue, concerts impromptus, terrasses pleines d’histoires… Une ville qui respire la culture et le mouvement.



Nous y avons fait une pause de quelques jours avant de reprendre la route vers le golfe du Morbihan, toujours aussi chouette, avec ses petites criques cachées, ses vieux sentiers de douaniers et ses huîtres qui n’attendent que d’être adoptées. On en a profité pour pousser jusqu’à chez notre grande copine de longue date, Sylvie – alias Mawie-Tewese (ne demandez pas pourquoi, c’est confidentiel).



Puis cap à l’ouest, direction la forêt de Huelgoat, sublime et mystérieuse, berceau d’innombrables légendes celtes. Là, tout respire le fantastique : des chaos de rochers moussus, des arbres tordus comme des anciens gardiens du lieu, et des cours d’eau qui murmurent des histoires aux oreilles patientes.










C’est là, juste après la Forêt de Huelgoat, qu’on a crevé une roue de Marcel… en roulant sur un boulon ! À la veille d’un long week-end, à 17h30, en pleine campagne du côté de Landerneau, la poisse maximale. Quelle est la probabilité pour ça ?! De la chance à pas de bol, on vous dit. Heureusement, on a trouvé un super garagiste qui nous a sorti de la galère en un temps record. Et puis, de toute façon, il fallait qu’on change les pneus : on avait dépassé les 25 000 km, c’était une bonne excuse pour prendre soin de Marcel.

Et enfin, au bout de cette traversée qui nous aura conduit depuis la Provence en traversant 1000 péripéties, on retrouve les longues plages de silence du Finistère de l’autre côté, un peu plus brut, un peu moins carte postale. Celui dont la blondasse est tombée follement amoureuse. Un coup de foudre minéral, iodé, presque chamanique.
Mais avant de vous raconter nos aventures dans ce Finistère sauvage — où les mouettes parlent breton, où les crêpes sont une religion, et où la blondasse a failli acheter un dolmen en pensant que c’était son home sweet home— on va d’abord faire une pause. Histoire de trier les photos et de digérer les galettes et le cidre.
Bref, à très vite pour un nouvel épisode, avec du granit, des embruns, du sable plus blanc que neige et des eaux qui n’ont rien à envier aux Seychelles.
Et promis, cette fois, on ne mettra pas six semaines à vous l’écrire. Enfin… on essayera.