Et voilà notre bon vieux Marcel fin prêt à avaler les kilomètres sur les routes belges. Nous, naïfs comme deux gamins persuadés que la Belgique se résumait à un plat pays sans le moindre relief… eh bien on s’est mis la frite dans l’œil comme on dit dans le jargon scientifique… Que nenni ! Direction les Ardennes : une région vallonnée, bucolique, qui ondule sur plusieurs pays – Belgique, France, Luxembourg et Allemagne – et qui casse complètement le cliché du pays plat.
Première étape : retrouvailles avec Juliet et Jean-François, des amis belges rencontrés il y a quinze ans en Australie, alors qu’ils faisaient un tour du monde en camion et que nous, nous vivions là-bas. Après plusieurs années à vadrouiller un peu partout, ils sont revenus dans leur pays et ont bâti une maison bioclimatique de dingue, autonome et en plus elle est vraiment très jolie (en tous cas nous on kiffe ce genre d’architecture donc on a adoré). La soirée est joyeuse, ils ont à présent 4 mômes adorables, les discussions s’enchaînent, les souvenirs fusent… bref, le bonheur de se retrouver.





Puis, cap sur l’Allemagne pour un autre arrêt amical : Anja, l’ancienne manager du BG, et Ulf, son mari. Accueil royal, deux jours de papotages, de succulents repas et… première nuit dans un lit, dans une maison depuis le début de notre périple qui remonte au 9 janvier, c’est-à-dire plus de 6 mois. Autant dire qu’on a dormi comme deux koalas shootés à l’eucalyptus. Sensation étrange mais terriblement agréable après des mois à dormir dans Marcel.





Requinqués, on reprend la route, on demande à Ginette de nous guider jusqu’à Dresde et elle s’exécute avec sa voix de chanteuse de cabaret.
Petite parenthèse routière: il est bon de noter que les autoroutes allemandes, c’est un peu comme une piste d’atterrissage sans péage : tu montes, tu traces, et hop, c’est gratos. Mais le vrai frisson, c’est pas ça. C’est ce moment où tu roules tranquillement à 110, peinard, et qu’un bolide te dépasse à 230 km/h. Le temps de cligner des yeux, tu te demandes si t’as pas rêvé ou si t’es pas dans un cartoon de Bip Bip et Coyote.
Sur le chemin, on franchit sans même nous en rendre compte l’ancienne ligne de séparation entre la RFA et la RDA – vestige d’une époque sombre heureusement révolue.
Arrêt à Weimar, ville splendide aussi bien sur le plan architectural que culturel. Haut lieu du mouvement Bauhaus, elle a vu naître ou passer des géants comme Goethe, Bach, Liszt, Wagner, Nietzsche, Strauss, Kandinsky ou Paul Klee. Rien que ça. On aurait presque peur de marcher dans la rue et de croiser un génie à chaque coin de trottoir. Même les pigeons semblent cultivés ici!!
Ensuite, on hésite : Leipzig ou Dresde ? Le dilemme est coriace. Finalement, on choisit Dresde, capitale de la Saxe et joyau baroque. En la voyant aujourd’hui, il est tres difficile d’imaginer qu’elle fut totalement détruite entre le 13 et le 14 février 1945. Une seule nuit de bombardements et la ville est devenue un champ de ruines, emportant des dizaines de milliers de vies civiles. Aujourd’hui surnommée “la Florence de l’Elbe”, Dresde a été magnifiquement reconstruite. Certes, il lui manque peut-être un petit “je-ne-sais-quoi”, mais il est presque impossible de penser que ce centre sublime n’était que gravats il y a 80 ans.
Nous n’y resterons qu’une nuit : le centre est relativement compact et se visite facilement. On trouve un spot royal pour Marcel : à 100 mètres de l’Augustusbrücke qui enjambe l’Elbe, et à 5 minutes à pied de la Schloßplatz et de monuments emblématiques comme la Frauenkirche.
Réveillés à 5h30 (oui, oui, c’est l’heure où les fous se lèvent !), baskets aux pieds : rues quasi désertes, Dresde pour nous tous seuls, baignée dans les couleurs du lever du soleil, vraiment magique.












Puis on quitte l’agitation urbaine pour filer vers le Parc National de la Suisse Saxonne, en Saxe, à la frontière tchèque. Comme dans tout parc national, dormir sur place est interdit. On déniche donc un spot parfait dans le jardin de Marco et Marlene, un couple adorable qui nous accueille avec une gentillesse désarmante. Le lendemain, à 7h pile, Marco démarre sa voiture et nous dépose à l’entrée du parc. Résultat : on est les premiers à admirer le fameux pont de Bastei, seuls au monde devant ce décor incroyable qu’on croirait sorti tout droit d’un film fantastique.





Après ce moment suspendu, on s’enfonce dans le parc national. Sentiers énigmatiques, falaises de grès qui s’élancent comme des cathédrales naturelles, gorges tapissées de mousse et forêts profondes où l’air embaume la résine et la pierre humide. Chaque pas résonne dans un silence feutré, brisé seulement par le chant d’un oiseau invisible ou une branche qui craque sous nos chaussures. Le soleil perce par endroits, découpant des rais de lumière dorée entre les troncs. On se sent minuscules et apaisés, happés par cette nature brute, un peu comme si le monde extérieur avait disparu.








Le soir, on s’endort comme deux bienheureux, le corps chargé de cette nature brute et l’esprit déjà tourné vers de nouvelles aventures. Parce que oui, faut garder la patate pour la suite !
Demain, on dit officiellement au revoir à l’Allemagne, on plie bagage et on saute la frontière. Direction Tchéquie, avec tout ce que ça promet d’inconnu, de surprises et de petits bonheurs à dénicher. On est curieux, excités, et impatients. Alors… tchao Deutschland, dobrý den Česká republika, on arrive !

